Comment manger mieux en mangeant gras ?
Qu’Il s'agisse du beurre, de l’huile, du jaune d'œuf ou des plats industrialisés et tels que la mayonnaise ou les margarines, le gras est présent dans notre vie au quotidien. Cependant, le rapport entre santé et lipides réside dans un précieux équilibre.
Les lipides ne sont pas nos ennemis : bien au contraire
Le gras, que les nutritionnistes appellent les lipides, occupe une place particulière en termes de nutrition, santé et plaisir. Adorés autant que détestés, recherchés autant que craints, les corps gras font partie de ces ingrédients très ambivalents.
Dans l’assiette, ils révèlent l'onctuosité, sont à l'origine du goût et des saveurs, de la texture en bouche et ils servent de liant pour nos sauces… Bref, ils sont indispensables et savoureux.
Dans l'organisme, les lipides et les graisses constituent une partie importante de notre corps, de nos cellules et de nos membranes. Par exemple, notre cerveau est constitué à 80 % de matières grasses.
Les lipides sont en fait une grande famille inhomogène dans laquelle nous retrouvons des molécules différentes allant du cholestérol, aux acides gras saturés jusqu'aux oméga 6 et/ou aux précieux oméga 3.
Être en bonne santé grâce aux bonnes graisses
Tous les lipides jouent un rôle important pour le maintien de la santé. D’abord dans la structure de nos cellules et de nos tissus, ils servent également à la synthèse d'hormones (par exemple de la vitamine D ou du cortisol). Enfin, ils sont également utilisés pour favoriser des molécules inflammatoires ou au contraire anti-inflammatoire.
La consommation de bonnes matières grasses et d’oméga 3 qui constituent 40% du cerveau a très certainement contribué à l'évolution de l'intelligence humaine par rapport à celle des autres mammifères.
L’un des secrets de la nutrition santé : la forte consommation d'acides gras oméga 3 par rapport à une très faible consommation d'acides gras oméga 6.
L’équilibre des acides gras : une garantie santé
Dans les huiles et les graisses, se trouvent différentes molécules d'acides gras. Parmi celles-ci, deux sont particulièrement importantes et doivent exister de façon équilibrée. Il s'agit des acides gras oméga 6 et des acides gras oméga 3.
Les premiers, les omégas 6 sont peu nombreux certes présents dans les modèles naturels et ancestraux mais en quantité raisonnable, adaptée à nos besoins et notre santé, alors qu'ils sont très excessivement représentés dans notre mode de vie moderne.
Les acides gras oméga 3 au contraire étaient présents et abondants dans l'alimentation paléolithique, dans les alimentations des peuples traditionnels alors qu'ils sont relativement absents des menus des modes de consommations occidentaux.
S'il ne s'agissait que de goût et de mode, tout irait bien. Mais les scientifiques ont démontré de façon incontestable que le rapport oméga 6/oméga 3 était lié au bon fonctionnement cardiovasculaire.
Une alimentation trop riche en gras
Au cours du siècle dernier, les modes d'alimentation des pays industrialisés ont considérablement changé, notamment en matière d'apports de graisses.
Si la consommation totale de matières grasses a augmenté, c'est surtout au profit des acides gras saturés mais surtout des acides gras oméga 6 contribuant ainsi à un considérable déséquilibre du rapport ancestral oméga 6/oméga 3.
À l'époque paléolithique, ce rapport était situé entre 1 et 3. Au cours du siècle dernier, ce rapport n'a cessé d'augmenter pour culminer aujourd'hui aux alentours de… 18 à 23.
De plus, les modes de production industrielle comptent inventer de nouvelles matières grasses : il s'agit des graisses TRANS issus des procédés de transformation industrielle que l'on retrouve dans certaines margarines, les viennoiseries, les crèmes glacées, un grand nombre de produits industriels modernes…
Une alimentation trop faible en gras
En réponse à l'augmentation considérable des maladies cardio-vasculaires et à l'élévation du taux moyen de cholestérol chez l'homme moderne, la diététique des 20 dernières années à chercher à réduire le gras comme s'il était responsable de la mortalité.
Ce fut l'époque de l'allégé, de la traque au cholestérol, du « low fat » ou il devenait dangereux de manger gras. Une erreur puisqu’il n’est pas conseillé de réduire totalement le gras de nos assiettes, il faut veiller à la qualité des graisses consommées.
Le modèle crétois
Lorsque les scientifiques, au cours d'une très célèbre étude appelée étude des sept pays, regardent les risques de mourir d'une maladie cardiaque chez les crétois, elle est 10 à 100 fois inférieur aux méditerranéens, aux Français, aux Belges et surtout aux Finlandais et Américains.
Or, les crétois ne mangent pas moins gras mais au contraire très gras ! Attention, pas n'importe quelles graisses, ce sont les champions du monde de la consommation des oméga 3.
La margarine riche en oméga 3
Afin de trouver la place des oméga 3 comme facteur de protection de la santé, la très célèbre étude de Lyon a donné simplement une margarine riche en colza (source d’oméga 3), à des patients ayant déjà fait un infarctus du myocarde.
Surprise, en quelques mois, on constate une réduction des récidives de maladies cardiaques, d'infarctus et de morts de l'ordre de 70 % par rapport à ceux qui réduisaient tout simplement l'apport en cholestérol. Cette première révolution montrait déjà qu'il était possible en mangeant mieux gras d'avoir un impact sur notre santé.
L’exemple de la Finlande
Les Finlandais qui étaient les champions du monde de la mortalité cardiaque ont appliqué à l'échelle de leur nation une politique nutritionnelle de santé qui a visé à augmenter les apports en acides gras oméga 3 tout en réduisant les apports en oméga 6.
Résultat : en 20 ans, une amélioration nette de la proportion de personnes avec une fonction cardiovasculaire normale.
La nouvelle révolution : manger mieux gras
En mars 2010, l'agence française pour la sécurité alimentaire (Afssa) a rendu un rapport sur l'état actuel des connaissances en matière de graisses et de santé et les dictées de nouvelles recommandations. Hélas, ce rapport est resté insuffisamment connu et diffusé : qui trouve-t-on en substance ?
- Il n'est plus d'actualité de manger moins gras mais il faut manger mieux gras
- Pour les personnes à risque, il est même conseillé de manger encore plus gras que d'habitude : jusque 40 % de l'apport énergétique (au lieu des « traditionnels moins de 30% des anciens conseils obsolètes) !
- Oui mais… Moins d'oméga 6 et plus oméga 3 !
- Enfin, ne plus diaboliser le gras mais rechercher l'équilibre.
Quels objectifs adopter au quotidien ?
C’est finalement très simple : adieu les diètes insipides, adieu les régimes diététiques sans graisses, bienvenue au gras dans l'assiette pour peu qu'ils respectent certaines règles de quantité, équilibre et rapport qualité.
- Consommer plus d’oméga 3 : c'est le grand absent dans nos assiettes ! Nous le trouvons sous diverses formes dans les aliments : tout d'abord les huiles végétales contiennent l'acide alpha linolénique. Son apport est bien trop faible pour garantir notre santé. Il nous faut donc apprendre à faire les bons choix d'huile dans nos assaisonnements, dans nos assiettes et dans nos menus (huile de colza très riche en acide alpha linolénique oméga 3).
- Consommer moins d’oméga 6 : bien que ces acides gras soient également essentiels, ils sont devenus trop abondants, nous devons donc retrouver le bon sens, celui de la modération. Le consommateur soucieux de sa santé doit donc apprendre à modérer voire à éviter la consommation quotidienne d’huiles sources oméga 6.
- Oublier les acides gras trans d’origine industrielle : ces derniers n'offrent aucun avantage, et sont toxiques pour l'organisme car ils favorisent l'ensemble des maladies de civilisation, les maladies cardio-vasculaires, les cancers, les allergies… Leur seul intérêt : favoriser la création des nouveaux aliments industriels : margarine, crème dessert, crème glacée, viennoiseries… Alors qu'il serait possible de faire autrement.
Changer ses habitudes alimentaires en pratique
Les recommandations de nutrition moderne reposent à la fois sur une nutrition-santé pour l'homme mais également sur une démarche respectueuse de la planète et d'un développement durable. Les deux sont compatibles et indispensables.
- Choisir les bonnes huiles : lors de vos achats, orientez-vous préférentiellement vers l’huile de colza. Moins chère et savoureuse, elle est la principale source d'oméga 3 pour nos assaisonnements mais aussi pour la cuisson ! Contrairement aux idées reçues, elle est certainement la meilleure huile à conseiller au quotidien tant pour l'assaisonnement que la cuisson modérée (maximum 180°). On peut donc l’utiliser dans les poêles pour chauffer, saisir, cuisiner…
- Éviter les sources de « lipides indésirables » encore trop fréquemment présents : limitons au maximum l'utilisation d’huile de tournesols, de pépins de raisin, de maïs qui sont une source considérable oméga 6 déjà trop abondants dans notre alimentation.
- Choisir également l’huile d’olive ? Il faut savoir qu'elle n'apporte pas d'oméga 3. Elle n'est donc pas la solution parfaite. Cependant, elle pose moins de problèmes car elle n'apporte pas non plus d'oméga 6. Elle a donc tout à fait sa place modérément dans nos menus pour peu qu’on y ajoute d’autres sources d’acides gras oméga 3.
- Consommer des acides gras oméga 3 :
Les huiles végétales : nous pouvons trouver des concentrés d'acides gras oméga 3 : huile de lin et huile de cameline offrent une concentration remarquable. Cependant elles sont moins connues et moins faciles à trouver. De plus, elles sont plus fragiles à conserver. La consommation de noix voire même de l’huile de noix très fraîche peut également être une solution intéressante.
Les matières grasses animales : elles peuvent être riches en oméga 3 pour peu que l'animal lui-même ait été correctement nourri, par un mode d'alimentation sources d'oméga 3. C'est le cas des animaux qui bénéficient de filières de l'agriculture à vocation santé, des filières du lin ou des filières oméga 3. En donnant des graines de lin, de la luzerne, de la gâche ou d'autres sources d'aliments riches en oméga 3, nous préservons la planète (moins de pollution, moins de consommation d'eau pour la production…), mais nous préservons également la santé de l'animal et surtout la qualité des sous-produits animaux. Lait, œuf et poulet deviennent ainsi sources d’acides gras oméga 3. - Manger des poissons gras. Ils sont en effet sources d'oméga 3. La consommation de 2 ou 3 portions de poisson par semaine contribue à cet apport de bonnes graisses indispensables. Le conseil : s'orienter vers les poissons de pêche durable et choisir des petites espèces moins polluées comme les sardines et le maquereau.